Dans une interview accordée au journaliste Alain FOKA, le chef d’Etat Burkinabé Ibrahim Traoré, est revenu sur les raisons qui ont motivé le retrait des pays membres de l’Alliance des États du Sahel (Burkina Faso, Mali, Niger) de la CEDEAO. Selon ses propos, ce retrait a été mûrement réfléchi et la décision n’a pas été prise sous l’effet de la colère.
Dimanche 28 janvier, les trois pays de l’AES (Mali, Burkina Faso et le Niger), ont annoncé leur retrait « immédiat » de la CEDEAO, reprochant à l’organisation, les sanctions qui leur ont été imposées dans le cadre des efforts visant à inverser les coups d’État dans leurs pays. Ils ont également cité l’éloignement de la CEDEAO de l’esprit panafricaniste et l’échec du bloc régional à endiguer l’insécurité et le terrorisme dans leurs pays comme raisons de leur retrait.
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De son côté, la CEDEAO s’est plainte de n’avoir pas été saisie formellement par les trois Etats, ajoutant qu’elle est prête pour une solution négociée. L’Union Africaine appelle pour sa part au dialogue et à la préservation de l’unité de la CEDEAO.
Sauf que cette préservation d’unité de la CEDEAO souhaitée par l’Union Africaine, n’aura pas un écho favorable au sein de l’AES. Le Mali, le Burkina Faso et le Niger ne compte pas faire leur retour au sein de la CEDEAO et projettent d’ores et déjà, des projets communs pour l’émancipation de l’AES.
« Ce n’est pas de gaieté de cœur que de tourner le dos… »
Très attendu, le chef d’Etat du Burkina Faso, Ibrahim Traoré s’est prononcé sur le retrait des pays de l’AES de la CEDEAO, dans une interview accordée au journaliste Alain FOKA.
« Ce n’est pas de gaieté de cœur que de tourner le dos à une organisation, mais c’est à l’issue d’une analyse profonde », a déclaré Ibrahim Traoré, rappelant que l’objectif dès la création de la Communauté des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), c’était une volonté d’intégrer les peuples, de faire de l’épanouissement de l’économie, la solidarité de l’entraide en tout cas des vertus du panafricanisme qui ont conduit les chefs d’Etats à créer cette organisation.
Malheureusement au fil du temps, a-t-il expliqué, « l’organisation a perdu ses valeurs là. Aujourd’hui le constat est clair. Je pense que depuis plus d’une décennie, les Républiques sœurs du Mali, du Niger sont en guerre contre le terrorisme et Burkina bientôt près d’une décennie, on est en guerre ».
« Cette organisation qui était donc censée créer de l’entraide et de la solidarité, nous n’avons jamais reçu de l’aide venant de cette organisation : aucun soldat, aucun logistique, aucune compassion, rien », a déploré le Capitaine Traoré.
La décision de retrait des pays de l’AES ne peut s’appliquer qu’au bout d’un an en vertu du traité de la CEDEAO et pendant ce délai d’un an, l’ »État membre continue de se conformer aux dispositions du présent Traité et reste tenu de s’acquitter des obligations qui lui incombent en vertu du présent Traité ». Sauf que cette fois, et contrairement à la Mauritanie, les pays de l’AES qui ont annoncé leur retrait avec effet « immédiat », ne compte pas se plier à ce règlement de l’organisation sous-régionale.
« Eux-mêmes, ils ne respectent pas leurs textes. Les sanctions infligées au Niger, ça n’existe nulle part dans les textes. Nous quittons, mais nous restons panafricains. Un africain qui veut venir au Burkina, il est libre de le faire », a martelé le président Ibrahim Traoré.
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« Notre départ de la CEDEAO est très bien réfléchi. Nous avons pris le temps d’analyser les choses, de peser beaucoup de choses et enfin, de décider. Le peuple a été résilient », a-t-il insisté.
Il a par ailleurs rassuré que l’AES peut se suffire et vivre normalement, ajoutant que leur mission, c’est d’éveiller les consciences et travailler pour l’émancipation de leurs peuples. Il a également souligné le patriotisme du peuple burkinabé dans la lutte contre le terrorisme, insistant que plusieurs avancées ont été enregistrées dans cette lutte.
Dans les prochains mois, l’AES va également se pencher sur l’épineuse question de monnaie, selon Ibrahim Traoré qui, toutefois, ne souhaite pas mettre la charrue devant les bœufs.