Les sénateurs ont adopté, mardi 7 novembre, la suppression de l’aide médicale d’État (AME), réservée aux sans-papiers, à l’occasion de l’examen du projet de loi « immigration ». Le Sénat lui a substitué une « aide médicale d’urgence ». Le gouvernement ne s’est pas prononcé contre.
Par 200 voix pour et 136 contre, les sénateurs se sont en effet prononcés pour la suppression du dispositif, réservé aux sans-papiers, à l’occasion de l’examen du projet de loi « immigration ». Le Sénat lui a substitué une « aide médicale d’urgence ». Cette suppression pourra toutefois encore être retoquée lors de l’examen du texte à l’Assemblée nationale à partir du 11 novembre.
« Une faute sanitaire, morale et économique »
L’adoption de l’article de suppression de l’AME a fortement fait réagir les parlementaires de gauche. « Ça coûtera plus cher et ça met tout le monde en danger, mais par pur dogmatisme, par haine de l’étranger, la droite sénatoriale, main dans la main avec l’extrême droite, a décidé de voter pour supprimer l’aide médicale d’état » fustige sur X (ex-Twitter) Mélanie Vogel, sénatrice écologiste des Français de l’étranger. « Soigner les gens quand ils sont malades, cela fait partie des questions qui ne devraient même pas susciter de débat entre nous », s’inquiète Ian Brossat, sénateur communiste de Paris, qui rappelait dans un entretien pour l’Humanité que la loi immigration de Gérald Darmanin reprenait « tous les poncifs de la droite et de l’extrême droite sur ce sujet, en présentant l’immigration comme une menace. »
Cette suppression constitue pour Bernard Jomier, sénateur écologiste de Paris apparenté socialiste et Médecin généraliste, « une faute sanitaire, morale et économique ». En effet, l’argumentaire développé par les partisans de la suppression de l’AME gravitait autour d’une rhétorique raciste prétendant que le dispositif était sujet à nombre d’abus et encourageait les personnes sans-papiers à « profiter » du système de santé français. Pourtant, il n’en est rien, selon le rapport Evin-Stefanini. Missionnés par Élisabeth Borne en personne, Patrick Stefanini et Claude Evin précisent même que 50 % des étrangers qui pourraient y prétendre n’en font pas la demande. La Première ministre elle-même n’était pas favorable à la suppression de l’AME. Mais le gouvernement ne s’est pas opposé à la proposition de la majorité sénatoriale. La ministre déléguée aux professions de santé, Agnès Firmin Le Bodo, a argué du fait que cette réforme « n’a rien à faire » dans le projet de loi pour justifier l’abstention de l’exécutif.
Si elle entrait en vigueur, l’aide médicale d’urgence votée mardi 7 novembre serait « recentrée » sur la prise en charge « des maladies graves et des douleurs aiguës », ainsi que de la prophylaxie, réduisant le panier de soins actuellement accordé à quelque 400 000 bénéficiaires.